VITICULTURE
Travail du sol et risque de gel en vigne : attention danger !
Comment protéger la vigne face à l’aléa gel au printemps ? Outre les différents moyens de protection (tours à vent, bougies, bâches…), les pratiques jouent un rôle important dans la prévention. Le travail au sol, en particulier, augmente considérablement le risque de gel.
Avec des hivers de plus en plus doux, l’avancée des stades phénologiques de la vigne représente un risque plus important de dégâts face au gel de printemps. Comment adapter ses pratiques à cet aléa ? « Il faut déjà comprendre que l’humidité est un facteur de risque hyper important, insiste Guillaume Delanoue, ingénieur viticole à l’IFV. À même température, une humidité de 25 % peut griller 50 % de bourgeons de plus par rapport à une parcelle sèche ! Par ailleurs, plus il fait froid et plus l’écart d’hygrométrie s’accentue. » L’ingénieur de l’IFV a conduit plusieurs tests à Chinon et Quincy pour évaluer l’impact du travail du sol sur le risque de gel. « On constate que le travail du sol dégage de l’humidité. Le problème c’est qu’en avril, dans la période des épisodes gélifs, les viticulteurs ont recommencé à travailler leurs sols pour entretenir le cavaillon et l’inter-rang. Il poursuit : Notre étude a montré qu’aux heures les plus froides, l’humidité relative au niveau des bourgeons est supérieure de plus de 30 % dans les parcelles travaillées que dans les parcelles non travaillées. Et cela pendant au moins deux jours ! »
Ne pas toucher la parcelle les jours précédents le gel
On l’aura compris : Un travail du sol mal positionné ou une tonte de couvert trop importante peuvent provoquer de gros dégâts », signale Guillaume Delanoue. Si la météo est pluvieuse, mieux vaut s’abstenir de toucher la parcelle : « S’il pleut 20 mm par jour, il faudra 20 jours pour retrouver un taux d’humidité équivalent entre une parcelle travaillée et une parcelle non-travaillée. »
Il recommande : « Pour le cavaillon, la règle est de ne pas y toucher les 7 jours avant un risque de gel pour éviter les dégâts. De manière générale, mieux vaut ne plus rien toucher du 10 avril au 5 mai. »
Quel enherbement ?
Se pose donc la question de l’enherbement : comment gérer ses engrais verts et à quel moment les détruire ? « Soit avant la période critique, soit après, résume Guillaume Delanoue. Les engrais verts suffisamment hauts pour recouvrir les bourgeons (des deux côtés du rang) peuvent avoir un effet protecteur en cas de gel. Mais attention : un couvert trop dense présentera beaucoup d’humidité, accentuant le risque ! » La règle : « Si on trempe les pieds lorsqu’on marche dedans, il vaut mieux le faire sécher le plus vite possible, en faisant une tonte rase au moins 7 jours avant le gel. Il poursuit : Faucher est la pire des choses à faire, car c’est ce qui libère le plus d’humidité. Mieux vaut coucher le semi ou le rouler, mais je recommande plutôt de ne rien faire du tout ! »
Exposition, taille, aspersion… Quels effets ?
Guillaume Delanoue a également observé les impacts de plusieurs pratiques. Ses conclusions ? « L’exposition et l’orientation de la parcelle n’ont finalement que peu d’effets, car on n’a jamais les mêmes vents ni le même gel. » L’utilisation de biostimulants ? « Sortir un pulvé en avril avec des produits chers qui permettent de gagner 4 grappes… honnêtement, je n’y vois pas d’intérêt. » Par ailleurs, après un gel tardif au débourrement, certains se posent la question de tailler ou non pour relancer le bois. « Ça ne change rien, on ne récupère pas le rendement et on risque même d’aggraver la situation », estime-t-il.