L’année 2023 a été la plus chaude jamais enregistrée en Europe, avec 2020, selon le service Copernicus1 pour le changement climatique (C3S) et l’Organisation météorologique mondiale2, qui ont présenté leur rapport annuel sur l’état du climat en Europe le 22 avril dernier. Décryptage.
Selon le service Copernicus pour le changement climatique (C3S) : « L’Europe est le continent qui se réchauffe le plus rapidement ». Sur le Vieux continent les températures augmentent, en effet, deux fois plus vite que la moyenne mondiale et, depuis 2020, les records ne cessent d’être dépassés. « Les trois années les plus chaudes jamais enregistrées en Europe se sont toutes produites depuis 2020 et les dix années les plus chaudes depuis 2007 », affirme le rapport annuel sur l’état du climat en Europe publié le 22 avril par le service Copernicus pour le changement climatique et l’Organisation météorologique mondiale. L’année 2023 ne fait pas exception à la règle. Elle a été la plus chaude jamais enregistrée, avec 2020, quand l’Europe dans son ensemble a connu, de manière très hétérogène, des précipitations supérieures d’environ 7 % à la moyenne.
1 °C au-dessus de la moyenne
Dans le détail, côté températures, pour la majorité du continent européen, 2023 fait partie du top 10 des années les plus chaudes. Pour une grande partie de la région Sud-Est et la majorité de l’Europe de l’Ouest et centrale, 2023 constitue l’année la plus chaude jamais enregistrée. Pendant onze mois, les températures en Europe ont été supérieures d’1 °C à la moyenne (période de référence 1991-2020-NDLR) et de 2,6 °C par rapport à l’ère préindustrielle. Par ailleurs, le mois de septembre a été le plus chaud jamais enregistré quand, en novembre, le thermomètre est monté jusqu’à 6 °C au-dessus de la moyenne en Europe de l’Ouest et dans l’Arctique. Conséquence : le nombre de jours où le ressenti de température dépassant les 46 °C (ou stress thermique) a atteint un nouveau record en 2023 (plus de 60 jours par endroits) entraînant des répercussions sur la santé humaine. En effet, au cours des vingt dernières années, la mortalité liée à la chaleur a augmenté d’environ 30 % selon le C3S, et on estime que les décès liés à la chaleur ont cru dans 94 % des régions européennes surveillées.
Situation paradoxale pour les précipitations
Côté précipitations, selon les données prises en compte, 2023 est classée parmi les trois années les plus humides. Toutefois, la situation a été très hétérogène sur le territoire européen et au cours de l’année. Si en effet, les Pays Bas, le Nord-Ouest de l’Allemagne, le Danemark, la Slovénie, le Centre-Est de la Grèce, l’Ouest de la Turquie et certaines parties du Sud-Ouest de la Russie et de l’Ukraine ont connu une année particulièrement humide, les territoires orientaux et méridionaux de la péninsule ibérique, le Sud de la France, les pays à l’Ouest de la mer Noire et l’Ouest de la Russie ont dû faire face à des périodes sèches plus importantes que la moyenne. Conséquences : sécheresses et inondations se sont multipliées en Europe. Environ 1,6 million de personnes ont effectivement été touchées par des inondations l’an dernier. Un tiers des rivières européennes ont dépassé les seuils d’inondations « élevés » (période de retour de cinq ans) en 2023 et 16 % le seuil d’inondation « grave » (période de retour de 20 ans). Concernant la neige et les glaciers en Europe, la situation est aussi préoccupante. En effet, une grande partie du Vieux continent, en particulier en Europe centrale et dans les Alpes, le nombre de jours de neige a diminué par rapport à la moyenne. Les Alpes ont par ailleurs connu une perte de glace exceptionnelle. En 2022 et 2023, les glaciers alpins ont perdu environ 10 % de leur volume restant. Autant de nouveaux records qui prouvent, s’il était encore nécessaire de le faire, que l’urgence climatique est bien présente. Pour Mauro Facchini, chef d’unité pour l’observation de la Terre à la direction générale de l’industrie de la défense et de l’espace (DG DEFIS) de la Commission européenne : « Des informations environnementales solides, étayées par les données du programme Copernicus d’observation de la terre de l’Union européenne, révèlent des changements importants sur notre planète. Les données présentées dans le rapport sur l’état du climat en Europe sont alarmantes, mais cette recherche est également un outil essentiel pour nous permettre de passer à l’énergie durable, de réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre et de devenir le premier continent neutre sur le plan climatique d’ici à 2050. »
Marie-Cécile Seigle-Buyat
1. Copernicus est une composante du programme spatial de l’Union européenne, financé par l’UE, et constitue son programme phare d’observation de la Terre, qui s’articule autour de six services thématiques : atmosphère, marine, terre, changement climatique, sécurité et urgences.
2. L’OMM est l’organisation du système des Nations unies qui fait autorité en ce qui concerne l’état et le comportement de l’atmosphère terrestre, son interaction avec les terres et les océans, le temps et le climat qu’elle produit et la répartition des ressources en eau qui en résulte.
Et dans le monde ?
Selon les indicateurs climat du C3S, 2023 a été l’année la plus chaude jamais enregistrée depuis 1850. La température moyenne sur l’ensemble de l’année s’est élevée à 14,98 °C, soit + 0,17 °C par rapport à 2016 (année la plus chaude enregistrée auparavant), + 0, 60 °C par rapport à la période 1991-2020 et + 1,48 °C par rapport au niveau de la période préindustrielle (1850-1900).
Une situation des nappes contrastée
Le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a présenté son bulletin mensuel sur l’état des nappes le 16 avril. La situation est satisfaisante sur la majorité du pays.
La situation des nappes phréatiques françaises est « satisfaisante » dans une grande partie du territoire grâce notamment aux pluies importantes de mars, a annoncé le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) dans son bulletin mensuel le 16 avril. En mars, l’état des nappes s’est amélioré par rapport au mois précédent, avec 27 % des points d’observation au-dessous des normales. En effet, le mois passé a été marqué par un excédent pluviométrique d’environ 85 % par rapport à la période de référence 1991-2020, selon Météo-France. Le territoire a toutefois été touché inégalement par ces précipitations. En outre, les pluies n’ont pas toujours un effet immédiat, en fonction de la vitesse de recharge de la nappe, mais aussi d’un historique de sécheresse. Résultat : la situation est « défavorable », avec des niveaux « bas à très bas », au niveau de la nappe inertielle du Sundgau (sud Alsace) et des nappes du littoral du Languedoc et du Roussillon. Les nappes du couloir de la Saône et du Rhône sont comparables aux normales à modérément bas, mais les situations locales peuvent être hétérogènes. Des niveaux très hauts sont enregistrés sur la nappe de l’Avant-Pays savoyard, après une recharge très excédentaire. Les situations restent stables ou se dégradent légèrement sur les secteurs faiblement arrosés en février et mars : nappes du Grand-Est, du Jura, des alluvions du Rhône et de la Saône et du centre du Massif central.
M.-C. S.-B. avec Agra
Cette carte présente les indicateurs globaux traduisant les fluctuations moyennes des nappes. Ils sont établis à partir des indicateurs ponctuels relevés au niveau des nappes (piézomètres). L’indicateur « Niveaudes nappes » compare le mois en cours par rapport aux mêmes mois de l’ensemble de la chronique, soit au minimum 15 ans de données, et jusqu’à plus de 100 ans. Il est réparti en 7 classes, du niveau le plus bas (en rouge) au niveau le plus haut (en bleu foncé). L’indicateur « Évolution des niveaux » traduit la variation du niveau d’eau du mois échu par rapport aux 2 mois précédents (stable, à la hausse ou à la baisse).
Carte établie le 10 avril 2024 par le BRGM, à partir de données acquises jusqu’au 31 mars 2024. Source des données : ADES (ades.eaufrance.fr) / Hydroportail (hydro.eaufrance.fr) / Fond de carte © IGN.Producteurs de données et contribution : APRONA, BRGM, Conseil Départemental de la Vendée, Conseil Départemental des Landes, Conseil Départemental du Lot, EPTB Vistre Vistrenque, Parc Naturel Régional des Grandes Causses, Syndicat Mixte d’Etudes et de Travaux de l’Astien (SMETA), Syndicat Mixte pour la protection et la gestion des nappes souterraines de la plaine du Roussillon (SMNPR).