ENSEIGNEMENT
Une rentrée sous le signe des métiers du vivants pour les chefs d’établissements ardéchois
Le 19 septembre dernier, se tenait au Domaine Olivier de Serres au Pradel, la rentrée plénière des chefs d’établissements de l’Ardèche, une première pour le lycée agricole éponyme, signe de l’importance croissante de l’agriculture et des sciences du vivant dans la formation des jeunes et pour l’avenir du territoire.
Un peu plus de 40 % des agriculteurs partiront à la retraite dans moins de dix ans. En Auvergne-Rhône-Alpes, sur 16 600 exploitations qui s’arrêteront, un tiers n’a pas de repreneur. L’enjeu est immense en termes de renouvellement des générations et des défis actuels, tels que la souveraineté alimentaire, la préservation du patrimoine commun, de l’adaptation au changement climatique, de l’innovation, et de la redéfinition de la place du travail dans la vie des individus. L’enseignement agricole est donc un pivot à l’orée de cette petite « révolution ». Emmanuelle Rosnet, professionnelle de l’orientation à l’Éducation nationale et détachée à la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf) Auvergne-Rhône-Alpes, explique : « Aujourd’hui, seuls 7 % des élèves viennent de milieux agricoles ». Un public désormais plus diversifié, avec des aspirations variées. Matthieu Prévost, directeur de l’établissement Olivier de Serres, souligne : « Cette journée est essentielle pour comprendre concrètement les passerelles entre l’enseignement général et agricole, ainsi que les nombreux métiers liés au vivant ». Il ajoute : « Il est crucial de travailler en parallèle sur le dynamisme des territoires et des métiers agricoles dans une approche systémique ».
L’enseignement agricole ouvre des portes
Pour illustrer le parcours des élèves dans l’enseignement agricole, Élodie Dubois, vétérinaire depuis 2016, témoigne de son expérience. Dès la fin du collège, elle a choisi le lycée agricole Olivier de Serres à Aubenas avec l’objectif de devenir vétérinaire, une vocation née dans son enfance. Après un Bac S option biologie et écologie, elle se souvient de ces années marquantes, soulignant avoir fait ce choix « sans préjugés. Il me semblait simplement logique de poursuivre dans un lycée agricole pour atteindre mon objectif ». Depuis cette année, Élodie est marraine du programme « Cordées de la réussite » pour « Mon projet véto ». Ce dispositif vise à « susciter des vocations, promouvoir les études supérieures dès la 4e et accompagner les jeunes en levant les obstacles. » Si « les idées reçues ont la vie dure », il ne faut pas oublier que « les métiers agricoles ne sont pas cloisonnés. Il est essentiel de revaloriser les filières courtes, tout en reconnaissant l’existence d’une véritable part d’excellence », souligne Benoit Claret, président de la chambre d’agriculture de l’Ardèche. « Dans l’enseignement agricole, on découvre des filières dont on n’avait pas idée », ajoute Lucie Laville, ingénieure agronome et œnologue. Elle aussi est passée par l’enseignement agricole avant de rejoindre l’école d’agronomie de Montpellier, retenant particulièrement l’équilibre offert entre théorie et apprentissage de son parcours. Louis Baissade est un jeune agriculteur, non issu d’un milieu agricole, qui s’installe en élevage bovin allaitant et développe un atelier de production de châtaignes. Après un Bac pro en conduite et gestion d’entreprise agricole, suivi d’un BTS Acse, il n’avait qu’un seul objectif : s’installer, malgré les difficultés rencontrées en « partant de rien » . S’orienter vers ce qui plaît, sans préjugés, c’est le cheval de bataille de l’enseignement agricole pour encourager les jeunes à rejoindre les nombreuses formations diversifiées qui existent et les préparer aux métiers du vivant. « Une fois dedans, on se rend compte qu’il existe une multitude de types d’agriculture », témoigne l’agriculteur.
Des ponts à tisser pour construire ensemble, à travers le partage d’expériences
Bruno Ferreira, directeur de la Draaf Aura, croit fermement en l’importance du « tutorat, du mentorat et de la découverte sur le terrain » pour encourager les élèves à rejoindre les formations agricoles. Selon lui, ces approches sont essentielles pour briser les idées reçues. « Nous incitons les directeurs d’établissements à s’appuyer sur des parcours professionnels à la rencontre des élèves, car la motivation vient avec la découverte. » Il ajoute, à l’attention des chefs d’établissements généraux publics et des professeurs principaux de la salle : « C’est à vous de transformer l’essai en ouvrant les horizons de l’orientation, car de belles réussites attendent au bout du chemin ». Le mot de la fin revient à Benoit Claret : « L’agriculture, seule et isolée, ne peut pas relever les défis sociétaux et alimentaires auxquels nous faisons face ». La loi d’orientation agricole prévoit d’ailleurs un renforcement des échanges entre l’Éducation nationale et le ministère de l’Agriculture, avec notamment la création d’un Bachelor Agricole en trois ans à partir de la rentrée 2025.
Marine Martin
L’enseignement agricole en Aura en 2023
216,5 millions d’euros du budget de l’État, alloués pour l’enseignement agricole.
Première région de France en termes de densité agricole et d’apprenants.
117 établissements d’enseignements agricoles publics et privés (dont 4 en Ardèche).
2 écoles d’enseignements supérieurs agricoles.
110 sites de formations et d’apprentissage.
Plus de 30 000 élèves, étudiants et apprentis dans l’enseignement technique et supérieur court, (environ 1 140 élèves en Ardèche).
46 % de filles et 54 % de garçons.
Seulement 7 % des élèves proviennent d’un milieu agricole.
À la découverte des métiers agricoles dès le collège
Si l’après-midi était consacré aux témoignages d’anciens élèves, le matin était destiné à présenter aux chefs d’établissements plusieurs animations et ateliers autour de la formation aux métiers du vivant. La chambre d’agriculture était présente pour faire découvrir le stage « découverte des métiers de l’agriculture » qui s’effectue hors période scolaire, dès la 4e et permet de vérifier ces aptitudes et centres d’intérêt avant s’engager dans une formation. « L'objectif est d'accueillir des élèves et que la connexion avec le sens que donnent les métiers du vivant se fasse », explique Benoit Claret, président de la chambre d'agriculture. La chambre d’agriculture valide la mise en œuvre du stage d’observation en établissant une convention.