TROPHÉES DE L'INSTALLATION

« Ce que j'apprécie le plus dans mon métier, c'est sa polyvalence »

Camille Goudard, 26 ans, est une enfant du cru. Elle a baigné toute sa vie sur l’exploitation viticole familiale où sa mère travaille également. Après des études générales jusqu’au Bac, Camille Goudard s’oriente vers des études viticoles. « Je savais que je voulais travailler dehors », confie-t-elle au milieu des vignes. Elle poursuit alors ses études par un BTS viticulture œnologie en Bourgogne, puis une licence professionnelle, production viticole intégrée et enjeux environnementaux en alternance à Montpellier. « Je suis partie vinifier à Perpignan, tandis que l’hiver et la saison je travaillais avec mes parents. Puis j’ai fait de la vinification en Alsace et enfin à Crozes-Hermitage », rembobine-t-elle. Forte de son expérience aux quatre coins de la France, de fil en aiguille, Camille Goudard commence à travailler à temps plein sur l’exploitation familiale. Il était l’heure d’officialiser son installation.

En 2023, elle s’associe à 50/50 avec son père sur le « Domaine Goudard et filles » et devient cheffe d’exploitation. « Nous avons 7 ha de vignes, 6 en Saint-Joseph et 1 en IGP Collines Rhodaniennes. L’objectif n’est pas d’agrandir la surface », même si 0.6 ha supplémentaire rejoindra le « Domaine Goudard et filles » d’ici peu et sera consacré au blanc. Toujours en 2023, commence la vinification sur le domaine, puisque l’exploitation, après travaux, se dote d’une cave. Dans 10 jours, Camille Goudard commencera sa première mise en bouteilles qui sera mise en vente auprès des particuliers et des professionnels. En parallèle, le Domaine poursuit sa conversion en bio, lancée en 2023. Le premier millésime bio est attendu pour 2026.

Trouver l’équilibre, un travail quotidien

Des défis et des nouveautés pour la vigneronne, dont l’objectif est de réussir à bien gérer la mise en place de cette nouvelle organisation et d’arriver à « garder le rythme ». Une vie professionnelle remplie qui correspond à son tempérament : « ce que j’aime le plus dans mon métier c’est la polyvalence que celui-ci me permet : entre la gestion de la vigne, la cave, m’interroger sur les choix techniques, financiers… chaque jour est différent et j’aime conduire plusieurs projets à la fois », témoigne-t-elle.

En mars 2024, à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, Camille Goudard a organisé sur son domaine une table ronde avec des agricultrices. Un temps d’échange, à l’initiative des Jeunes Agriculteurs (JA) de l’Ardèche , qui a réuni une trentaine de personnes. L’idée était de donner la parole à une autre génération de femmes agricultrices, davantage invisibilisées « de l’âge de ma mère ». Des travailleuses, souvent considérées « comme une variable d’ajustement » sur l’exploitation et pourtant maillon essentiel à sa bonne marche. « Avant, les femmes n’allaient pas aux réunions, restaient en arrière-plan, les figures masculines étaient les principaux interlocuteurs », constate Camille Goudard. « On a l’impression que les agriculteurs travaillent davantage, mais parce que derrière, il y a les femmes qui font le reste : les papiers, les enfants, la maison, les courses : toute la logistique… » Dans son travail quotidien, la Tournonaise est elle aussi confrontée aux rôles stéréotypés préétablis : « j’avais l’impression qu’il fallait que je sois les deux : travailler autant que mon père et ma mère réunis », confie l’agricultrice. Seulement, la jeune femme n’a pas le don d’ubiquité a fortiori et ne peut donc se dédoubler. Alors, il a fallu réaliser qu’il était nécessaire de réduire le temps consacré à l’exploitation afin de pouvoir s’occuper des autres aspects de la vie : « les papiers professionnels et personnels, les courses, la maison etc. »

Une jeune vigneronne passionnée, prête à réaliser ses ambitions pour faire rayonner le domaine familial tout en aspirant à un équilibre réaliste.

M.M