COMMISSION EUROPÉENNE
Imaginer les fermes laitières de demain

Le Comité national interprofessionnel d’économie laitière (Cniel) a fêté son cinquantenaire le 26 juin dans les locaux de la Maison du lait à Paris. L’occasion pour ses dirigeants de revenir sur les grands moments de son histoire et de dresser quelques perspectives pour l’avenir.

A l’issue d’une assemblée générale statutaire de laquelle n’est sortie aucune fumée blanche pour remplacer le président sortant Thierry Roquefeuil (lire encadré), pas moins de deux cents invités se sont rassemblés dans la cour de la Maison du Lait à Paris pour célébrer les 50 ans du Cniel. Une première table ronde a permis de brosser à grands traits les principales étapes politiques, économiques et sociales qui ont guidé l’action d’une interpro- fession créée « après une importante crise de l’élevage laitier et bovin en 1973 », a rappelé Édouard Lynch, professeur d’histoire à l’Université de Lyon II. « Pour moi, l’élément déclencheur pour créer le Cniel fut la grève du lait de 1972 quand le prix du lait (57,50 ct/l) était inférieur à son coût de revient (68 ct/l) », s’est souvenu Jean-Paul Jamet, ancien directeur du Cniel. « C’est Jacques Chirac alors ministre de l’Agriculture qui a proposé la création d’une structure d’entente autour de la question d’un prix rémunérateur pour les éleveurs », a précisé l’universitaire.

La reconnaissance du Cniel

Il a bien fallu cinq ou six ans avant que l’interprofession ne trouve vraiment ses marques et n’atteigne son véritable rythme de croisière. Puis sont venus, la création des Criel, la taxe de coresponsabilité, la création du Centre interprofessionnel de documentation et d'information laitière (Cidil) puis les quotas laitiers en 1984 plus ou moins bien acceptés par une partie de la profession, les négociations nationales sur le prix du lait entre 1995 et 1997, l’élargissement du Cniel aux producteurs minoritaires et à la grande distribution. « Mais le caractère privé de l’interprofession que les pouvoirs publics français et européens voulaient remettre en cause, a finalement été maintenu », s’est réjoui Henri Brichart, ancien président. Aujourd’hui, l’organisation est connue et reconnue dans son expertise économique et scientifique. « Sans le Cniel, l’évolution sur la sécurité sanitaire et la qualité des produits se serait sans doute effectuée mais pas de manière aussi sérieuse et uniforme », a indiqué Jean-Vincent Gauzentes, directeur d’Agrolab‘s. Sur le paquet Lait, « l’interprofession a tout mis en oeuvre pour mettre en place les indicateurs de coûts de production et la contractualisation. Le Cniel a occupé l’espace », a reconnu Brigitte Misonne, cheffe d’unité Produits animaux à la Direction
générale agriculture de la Commission européenne.

« L’avenir sera recomposé »

Interlocuteur institutionnel reconnu, le Cniel a été un acteur majeur des États généraux de l’alimentation en 2017. Il lui reste maintenant à relever des défis, et non des moindres, avec la transmission et l’installation,
l’attractivité des métiers et la transition agroécologique. « Ce dernier sujet sera l’enjeu de la prochaine politique agricole commune », a assuré l’ancienne députée européenne, Anne Sander. Le PDG de l’Inrae, Philippe Mauguin, s’est voulu rassurant en certifiant qu’il n’y aurait pas d’agriculture durable sans élevage. « C’est un signal fort à donner pour les générations futures », a-t-il affirmé. Mais face à l’effacement presque invisible de la production laitière qui recense aujourd’hui environ 50 000 éleveurs (contre 672 000 en 1972), « l’avenir sera recomposé », a analysé le sociologue François Purseigle. Autrement dit, à l’heure « où nous entrons dans une ère d’incertitudes, il faudra offrir aux futurs installés des conditions de vie qui leur permettent d’assurer un revenu décent et de dégager du temps pour une vie moins contrainte. « Imaginer les fermes laitières de demain, c’est les réinsérer dans les territoires ruraux », a-t-il attesté. Dans ce domaine aussi, l’interprofession a « son rôle à jouer », a conclu Thierry Roquefeuil.

Christophe Soulard

 

La FNPL regrette le manque de consensus

Dans un communiqué publié le 27 juin, la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) regrette « qu’aucun consensus n’ait été trouvé pour désigner un ou une successeur(e) à Thierry Roquefeuil, que nous remercions pour son engagement sans faille ». Le choix s’effectuera dans les prochains jours entre les quatre vice-présidents : Marie-Andrée Luherne, exploitante dans le Morbihan, collège des producteurs (FNPL) ; Pascal Le Brun (La Coopération laitière) ; Marc Delage, la grande distribution et le commerce (FCD) et François-Xavier Huard, les industriels (Fnil). Deux candidats se sont déclarés, Marie-Andrée Luherne et Pascal Lebrun. L’élection du président, comme toute décision au sein du Cniel, doit se faire à l’unanimité.

AIDES PAC

Les syndicats de fonctionnaires claquent la porte

Alors que les versements des MAEC et des aides bio sont en retard, les syndicats de fonctionnaires ont claqué la porte d’une réunion avec la DGPE (ministère de l’Agriculture).

La situation sociale ne s’améliore pas dans les services d’économie agricole (SEA) du ministère de l’Agriculture, alors que les aides bio et des MAEC accusent plusieurs mois de retard de versement. Une
réunion de la formation spécialisée (FS) du conseil social d’administration (CSA) du ministère de
l’Agriculture a été « écourtée », le 18 juin, sur décision des organisations syndicales, rapportent-elles dans un communiqué. « Face aux alertes
répétées sur la situation dramatique des agents des SEA, réitérées encore ce jour avec vigueur par l’ensemble des
organisations syndicales, l’administration n’a apporté aucune mesure concrète, aucune proposition immédiate, pour améliorer le quotidien de ses agents, déplorent les neuf organisations syndicales. Elle s’y était pourtant engagée au CSA Forêt et Agriculture du 14 mai. » Sur son blog, l’Unsa a précisé le lendemain que les syndicats avaient obtenu l’installation d’un groupe de travail « consacré à élaborer des actions en réponse au mal-être ambiant qui secoue les SEA, sur la base du plan d’action mis en oeuvre en 2015 ». Mais « les agents restent en attente d’actions concrètes qui vont changer leur quotidien : un vrai plan, clair avec des objectifs et des moyens », regrette la CFDT Spagri. « En lieu et place, ils reçoivent des balbutiements d’actions qui ne répondent pas à leurs préoccupations ».
50 à 70 % de dossiers instruits. Du côté des agriculteurs, la vitesse de versement des MAEC et aides bio ne semble pas s’accélérer, malgré les annonces ministérielles. « La Pac 2023 est toujours en cours d’instruction et il reste dans chaque DDT plusieurs centaines de dossiers à instruire… », rapporte le Spagri, le 24 juin. « La campagne 2024 commence et les dossiers, souvent complexes, du droit à l’erreur, vont bientôt pointer le bout de leur nez… », s’inquiète la CFDT.