Après le lancement de l'opération « 10 000 arbres pour la forêt ardéchoise de demain » en début d'été, le Département a mené sa première action à Roiffieux. Différentes essences ont été plantées sur près d'un hectare, début novembre. Une manière de reconstruire le patrimoine forestier, tout en l'adaptant aux nouvelles conditions climatiques.
« Qui vient m’aider ? » Lance-t-il aux enfants autour de lui. Une pioche à la main, le président du Département, Olivier Amrane, s’apprête à planter un arbre, sous les yeux des élèves de CM1 et CM2 des écoles réfocaliennes. Cette parcelle se présente comme une trouée, au cœur des bois. Ici, le 20 mai 2022, un incendie avait ravagé plus de trois hectares de forêt. Les élus s’en souviennent comme si c’était hier. « Les feux de l’année 2022 ont été des moments difficiles à vivre. Ils ont suscité la crainte et la peur dans certains territoires, et ils ont mis nos sapeurs-pompiers à rude épreuve », se remémore Matthieu Salel, vice-président du Département, en charge de l’agriculture, de l’environnement et du tourisme. Mais, en ce mois de novembre 2023, l’heure est à la reconstruction. L’objectif du Département et de ses partenaires : planter 10 000 arbres au cours des prochaines années. « On ne cherche pas à tout replanter, précise Olivier Amrane. On veut initier quelque chose et sensibiliser, notamment les jeunes générations, sur les dangers des incendies et le maintien de la forêt ardéchoise qui représente 57 % de la surface de notre département. »
Des essences du sud
« Pourquoi il y a des points blancs sur la terre ? », « Comment ils ont fait pour que la motte tienne ? », « Est-ce que dans un an, il sera un peu plus grand ? » Les enfants, curieux, bombardent les agents de l’ONF de questions. Tout en les aidant à planter leurs arbres, ils répondent avec un plaisir non dissimulé. Julien Romatif, responsable du service forêt de l’ONF Drôme-Ardèche, et Julien Petit, gestionnaire des forêts communales du Nord Ardèche, donnent aussi des précisions sur les essences choisies : Chêne vert, Chêne tauzin, Cormier, Érable de Montpellier et Micocoulier de Provence. Des arbres venus du sud, peu communs au nord du département, mais qui semblent être les plus adaptés au lieu et au climat futur. « Nous avons réalisé un diagnostic en amont concernant les sols et des modélisations climatiques à 2085 », explique Julien Romatif. À la Fondation du patrimoine, le délégué en charge de la biodiversité, Hervé Coquillard abonde : « On voit déjà un glissement de certaines espèces méditerranéennes qui remontent vers le nord. Mais pour les arbres ça ne va pas très vite, alors on les aide ! C’est expérimental. On ne sait pas comment ça va fonctionner, mais comme on diversifie, il y en a forcément qui vont marcher et on aura un peuplement qui va trouver son équilibre. »
Sensibiliser le public
Car avec ce dispositif « 10 000 arbres pour la forêt ardéchoise de demain », le Département cherche aussi à mener des études empiriques, assorties d’un suivi scientifique. « On souhaite multiplier les essais dans différentes zones, pour effectuer un suivi et des comparaisons », détaille Aude Cathala, chargée de mission forêt bois au Département de l’Ardèche. L’intérêt est de disposer de références qui puissent être utiles à la filière forêt bois locale, d’accompagner l’adaptation de peuplements forestiers avant que le climat ne fasse de lui-même dépérir les arbres, plus vite qu’ils ne se renouvellent.
Ces expérimentations, menées dans le cadre du plan « 10 000 arbres », doivent toutefois répondre à un cahier des charges précis. « On ne plantera pas d’essences dites exotiques ou invasives, précise encore la chargée de mission forêt bois. La zone doit aussi être choisie avec soin pour être facilement accessible afin de mener des actions de sensibilisation auprès du public. » Comme ici, à Roiffieux, où les 1 300 premiers arbres ont été plantés près du parcours de santé. À l’avenir des panneaux explicatifs seront installés sur le site, pour permettre à chacun d’en savoir plus sur le maintien et les évolutions de ce patrimoine forestier qui nous est cher.
Pauline De Deus
Une cagnotte pour la forêt
Pour financer ces actions de reboisement, d'expérimentation et de sensibilisation, une collecte de fonds a été lancée, à l'initiative du Département de l'Ardèche sous l'égide de la Fondation du patrimoine.
Les incendies de 2022 ont marqué les esprits. Depuis les Ardéchois cherchent à se mobiliser pour reconstruire et prendre soin de leur patrimoine forestier. Pour accompagner cette dynamique, le Département a lancé le plan « 10 000 arbres pour la forêt ardéchoise de demain ». Une cagnotte a ainsi été lancée le 26 juin dernier à Berzème. Ce financement participatif est abondé par le Département à hauteur de 15 000 €, mais également par d'autres acteurs, tels que les Vignerons ardéchois qui ont participé à hauteur de 4 000 € suite à une vente aux enchères ou encore la Fondation du patrimoine, qui s'occupe de la gestion de la cagnotte en ligne, et qui s'est engagée à doubler les premiers dons à hauteur de 10 000 €. À Roiffieux, ce sont plus de 25 000 € qui sont investis dans cette première action, financée à 100 % par cette collecte. L'enveloppe permet non seulement de financer le reboisement, mais aussi l'entretien de la forêt et son suivi pour plusieurs années.
Objectif : 50 000 euros
La plateforme ouverte en juin dernier a déjà réuni plus de 10 000 €, un premier pas pour aller vers l'objectif de 50 000 € dans un premier temps, puis de 200 000 € dans les 5 prochaines années. Pour ces dons défiscalisés, le Département compte notamment sur des mécènes, des chefs d'entreprises, touchés par le sort de cette forêt ardéchoise si précieuse. De nombreux acteurs locaux sont aussi mobilisés pour mener à bien ce projet de reboisement : la Fondation du patrimoine donc, mais également l'Office national des forêts, le CNPF (Centre national de la propriété forestière) Aura, Fransylva07 (syndicat des propriétaires forestiers privés), la chambre d'agriculture, la fédération des chasseurs, l'Association des communes forestières d'Ardèche, l'interprofession Fibois, les élus locaux, entre autres. Les acteurs forestiers privés pourront également être mobilisés pour de futures actions : « On souhaite alterner entre des secteurs publics et privés », précise Aude Cathala, chargée de mission forêt bois au Département de l'Ardèche.
Comment donner ?
Et si vous aussi vous souhaitez donner, sachez que c'est possible ! Le montant minimal est de 5 € et dès 15 €, un arbre pourra être planté. Pour participer, rendez-vous sur le site de la Fondation du patrimoine, où vous trouverez le projet : « 10 000 arbres pour la forêt ardéchoise de demain ».
319 000
C'est la surface, en hectares, de la forêt ardéchoises. Ce qui représente un taux de boisement de 57 % sur l'ensemble du territoire. L'Ardèche est ainsi le 6e département le plus boisé de France et le 1er en Auvergne-Rhône-Alpes.
2200
C'est le nombre d'hectares partis en fumée tout au long de l'année 2022. Un chiffre multiplié par dix par rapport aux années précédentes.
60 000
C'est le nombre de propriétaires de bois en Ardèche (principalement des petites parcelles), ce qui représente 90 % de la forêt ardéchoise, tandis que 10 % de la forêt est publique.