SEMIS SOUS COUVERT
Le semoir est un drone

Pauline De Deus
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Les solutions agronomiques de demain se testent dès aujourd’hui dans les champs. Ainsi, un drone peut procéder à un semis sous couvert. Exemple au printemps sur une parcelle de blé de Quincieux (Rhône). 

Le semoir est un drone
Le pilote professionnel surveille toujours la progression du drone. Ici, Pierre Defalque, prestataire Drone Vert pour exo.expert et développeur de ce drone-ci. ©IAR

Il aura finalement fallu moins de deux heures au drone pour procéder au semis sous couvert de la parcelle de Cyrille Fiard, mercredi 24 mai dernier, à Quincieux (Rhône). Le recours à un drone n’est pas  nouveau en agriculture et viticulture. « Jusqu’à présent, 90 % de l’activité d’exo.expert tourne autour de la modulation d’intrants, notamment d’engrais azoté grâce à la cartographie et au diagnostic de parcelle », présente Alan Usseglio-Viretta président de la société exo.expert, développeur de cette solution. Aujourd’hui toutefois, le drone peut permettre de nouvelles utilisations comme le semis sous couvert végétal sans travail préalable du sol.

 « C’est une parcelle de blé de 8,5 ha, précise le producteur Cyrille Fiard, sur laquelle sont implantées trois modalités différentes de blé, et nous testons là trois modalités de semis », l’une trèfle-phacélie, une autre à dominante moutarde, la dernière entièrement trèfle violet « nous verrons bien comment cela prend, on en est à la phase essai ». À raison d’un hectare couvert par vol, le drone revient régulièrement sur sa « base », un petit espace dégagé dans la parcelle. Toujours à la surveillance et aux manettes, on trouve le pilote professionnel Pierre Defalque, prestataire missionné par le développeur de la solution exo expert. « Le drone pourrait tout gérer lui-même, mais je préfère l’accompagner pour l’atterrissage ». L’agronome et télépilote a commencé à tester ce nouveau drone l’an dernier, dans le Sud-Ouest, où une centaine d’hectares ont ainsi été semés. « C’est un début, nous comptons nous développer sur des groupements d’agriculteurs, comme ceux concernés aujourd’hui, intervient Alan Usseglio-Viretta. Notre objectif pour cette année est d’atteindre les 500 ha, car le drone répond à une vraie problématique ».

Profiter de l’humidité

Pour chaque vol, il faut remplir le stock du semoir et changer la batterie. Le drone reprend alors le semis là où il l’avait laissé. Volant à 4 m au-dessus de la culture, il répartit les graines de façon aussi homogène qu’un semoir classique. « Les intérêts de ce drone-là ce sont sa robustesse et sa balance intégrée qui permet de suivre en direct les quantités semées », précise le responsable d’exo.expert. Le drone peut porter jusqu’à 10 kg de graines, mais le principe est de le remplir en fonction de la densité prévue à l’hectare.

« L’intérêt de procéder au semis à cette période, soit un à deux mois avant moisson, souligne Alan Usseglio-Viretta, c’est que cela permet de profiter de l’humidité de la parcelle. Le couvert n’est donc pas implanté sur une culture sèche prête à moissonner ou sur un sol nu ». Et ne nécessite pas non plus d’intervention mécanique directe sur la parcelle.

Encore un levier non chimique

Cyrille Fiard fait partie d’un groupe 30000 et c’est dans ce cadre-là que le test intéressait aussi Laurence Garnier, de la chambre d’agriculture de l’Ain et animatrice du groupe 30000, composé de neuf agriculteurs répartis entre Quincieux et les communes limitrophes de l’Ain. « Cette parcelle se trouve en zone de captage prioritaire, nous devons donc accompagner les producteurs dans leurs pratiques agroécologiques et dans des solutions sans recours aux phytosanitaires. » Les leviers agronomiques tels que déployés ici pourraient ainsi à terme venir en soutien aux autres solutions déjà mises en place : « choix variétal, décalage des dates de semis, mélange de variétés », énumère notamment la conseillère chambre. « À nous de les mettre en évidence pour aider leur diffusion auprès des autres agriculteurs ».  La démonstration sera amenée à se renouveler, exo.expert s’appuyant sur des groupements d’agriculteurs un peu partout en France pour développer et peaufiner ses solutions. Côté budget, pour le semis sous couvert, il faut compter entre 40 et 50 €/ha, « mais cela économise du carburant et du temps à l’agriculteur… », fait remarquer Alan Usseglio-Viretta.

Françoise Thomas

 

Le drone balaie la parcelle par tronçon de 1 ha, à la vitesse de 18 km/h. ©IAR