RAVAGEUR
La chrysomèle du maïs poursuit sa progression

La chrysomèle du maïs est de plus en plus présente dans la région. Les adultes sont attirés par les maïs en fleur : pollen, soie, jeunes feuilles semblent bien appétents. C’est pourquoi, les premières parcelles à fleurir concentrent en général des densités de populations importantes.

La chrysomèle du maïs poursuit sa progression
Chrysomèle adulte. ©Arvalis

La chrysomèle a de nouveau été très présente dans la région durant la campagne 2023 : il est désormais courant de voir l’in­secte voler dans les parcelles de maïs courant juillet et août dans la majorité des secteurs de production de maïs de la région. Le réseau de piégeage mis en place depuis plusieurs années a montré une concentration de captures de chry­somèles particulièrement élevée dans le secteur des marais de Bourgoin-Jal­lieu (Isère) en 2023. Des dégâts de verse ont été observés sur certaines parcelles, avec un impact, parfois important, sur le rendement de la culture de maïs.

Au contraire, dans le secteur du Grésivaudan/Combe de Savoie, historiquement très touché par le rava­geur et où des dégâts très importants avaient été observés en 2022, les cap­tures ont fortement baissé en 2023. Une évolution très importante des assole­ments en 2023 sur ce secteur, avec une interruption des longues succesions de maïs, coupées par des céréales, sojas ou d’autres cultures a permis de réduire fortement la pression de l’insecte. Les maïs ont plus souvent été implantés sur des parcelles dont le précédent n’était pas un maïs. Les rares maïs positionnés après plusieurs années de maïs ont sou­vent été protégés par une application de microgranulé insecticide au semis. La combinaison de ces différents facteurs a permis une baisse marquée des cap­tures en végétation, et il n’y a pas eu de dégâts de verse signalés (Figure 1).

Dans les plaines de l’Ain et de Lyon, la présence de l’insecte devient également très importante sans signalement de dégâts de verse importants pour l’ins­tant.

Dans tous les autres secteurs de pro­duction de maïs de la région, comme la Bièvre, les Terres Froides, la Dombes, la Bresse, le Val de Saône, la Drôme, la vallée du Rhône, la présence de l’insecte poursuit sa progression.

En plaine du Forez, un piège à phéro­mones a capturé pour la première fois en 2023 douze chrysomèles, sur une parcelle cultivée en maïs depuis plu­sieurs années. L’Auvergne semble pour l’instant épargnée, la chrysomèle n’y a pas encore été capturée.

Comment repérer les dégâts ?

Les adultes sont attirés par les maïs en fleur : pollen, soie, jeunes feuilles semblent être bien appétents. C’est pourquoi, les premières parcelles à fleu­rir concentrent en général des densités de populations importantes. Les concen­trations d’insectes dans certaines parcelles peuvent être impression­nantes et susciter des inquiétudes. Ce­pendant les éventuels dégâts observés sur feuilles et sur les soies restent dans l’immense majorité des cas sans inci­dence pour les parcelles de maïs grain.

Les dégâts les plus importants sont invi­sibles puisqu’ils impactent les racines : les premières couronnes de racines sont nécrosées, pénalisant l’ancrage et la nutrition en eau et en minéraux des maïs. Les pressions les plus importantes peuvent conduire à de la verse, très im­pressionnante.

Cependant même en l’absence de verse, les dégâts sur racines peuvent provo­quer une perte de rendement : un impact de l’ordre de 10 % a été observé sur une parcelle d’essai à potentiel élevé en irri­gation non limitante en Alsace en 2023, sans symptôme visible. L’estimation des dégâts sur une parcelle nécessite, à partir de fin juin/début juillet, de pré­lever plusieurs pieds de maïs, de net­toyer le système racinaire et de l’ob­server attentivement, en particulier les couronnes racinaires les plus anciennes, en coupant les racines plus récentes si nécessaire.

Quel est l’objectif des suivis et piégeages réalisés ?

Le suivi des populations mené durant l’été par des piégeages d’adultes aplusieurs objectifs :

l Connaitre les dynamiques des popula­tions dans les différentes petites régions agricoles, pour estimer des niveaux de risque par secteur pour la campagne 2025.

l Observer plus finement la dynamique à la parcelle, dans le but de définir une stratégie pour 2025, en termes d’as­solement et de protection insecticide au semis.

l Privilégier une culture autre que le maïs en 2025 dans les parcelles de maïs 2024 concentrant le plus d’adultes (et donc vraisemblablement de pontes) durant l’été, surtout dans les petites régions agricoles où les populations de chrysomèle sont les plus élevées.

l Si du maïs est tout de même prévu en 2025 sur une parcelle avec un ni­veau de captures d’adultes conséquent l’été 2024, l’application d’un insecticide microgranulé au semis peut réduire le risque de dégâts. Le Force 1.5G a montré la meilleure efficacité dans nos essais (attention il est soumis à une restriction d’application d’un an sur trois).

Des modélisations réalisées par Arvalis, il y a quelques années, ont mis en évidence que l’application d’insecticide au semis ne permet pas de contenir les populations de chrysomèle dans la durée dans un territoire où la monoculture de maïs reste prépondérante, mais seule­ment de retarder l’apparition des dégâts de quelques années. Seule la rotation (avec toute autre culture que le maïs) éventuellement complétée ponctuelle­ment par l’application d’insecticide au semis permet de contenir l’insecte à un niveau acceptable.

Ophélie Boulanger, ingénieure régionale Arvalis - Rhône-Alpes. ([email protected])

Exemples de dégâts. ©Arvalis
REPÈRES /
©Arvalis

REPÈRES /

Le piégeage : l’indicateur pour decider

Le piégeage est l’outil le plus pertinent pour décider de l’itinéraire technique à adopter. Le piège chromatique (piège jaune) est adapté pour évaluer le risque de nuisibilité de la chrysomèle du maïs dès que les populations atteignent des niveaux significatifs.

©Arvalis

N’oubliez pas d’observer les racines

Le principal danger vient des larves qui consomment les racines. C’est le moment de les observer. Fin juin – début juillet, avec l’émergence des adultes, il est possible d’observer les larves de chrysomèles sur les pieds de maïs. À vos bêches !

CAMPAGNE 2024

Quelles sont les situations à risque ?

Dans les secteurs avec des niveaux de pression élevés en 2023 (marais de Bourgoin-Jallieu, plaines de l’Ain et de Lyon, Bièvre, mais aussi Combe de Savoie/Grésivaudan où les populations restent importantes), les adultes observés en vol l’an passé ont pondu dans les parcelles en maïs l’été 2023 (quel que soit l’historique de la parcelle). Leurs larves s’alimentent des racines des maïs semés ce printemps dans ces mêmes parcelles. Il est trop tard aujourd’hui pour intervenir contre ces larves, les éventuels dégâts sur les maïs 2024 ont déjà eu lieu. Les conditions de culture à venir pourront soit amplifier l’impact de ces dégâts racinaires (stress hydrique fort) ou limiter leur expression (bonne alimentation hydrique).

Il est possible que les excès d’eau et l’ennoiement de certaines parcelles au printemps 2024 aient impacté la survie des larves, la chrysomèle étant sensible à l’hydromorphie de l’éclosion aux stades larvaires. Finalement, certaines parcelles traitées en végétation contre la pyrale avec des produits à base de pyréthrinoïdes en 2023 ont parfois vu les captures d’adultes baisser sur pièges
chromatiques. Pour autant, les chrysomèles ayant émergé plus tardivement, non touchées par le traitement, auront tout de même eu l’occasion de pondre dans ces parcelles. Celles-ci sont par conséquent également à risque.