TROPHÉES DE L'INSTALLATION
La vigne, une histoire de famille

Sur les hauteurs de Valvignères, Lolita Flaugère, viticultrice de 32 ans, se tient au milieu de ses 80 arrhes de Grenache. La parcelle domine la vallée de la vigne qui offre une vue imprenable.

La vigne, une histoire de famille
Lolita Flaugère dans ses vignes. ©AAA_MMartin

Installée depuis 2021, la jeune exploitante a succédé à son père quand celui-ci a pris sa retraite en 2020. Elle a en charge 29 hectares de vignes dont 27 destinés au raisins de cuve et 2 au raisins de table qu’elle décide d’arrêter. « Il fallait faire un choix. La vendange se fait à la main, c’est devenu complexe de recruter, de plus les vendanges de raisins de table sont de plus en plus tôt et se chevauchent désormais avec celles du raisin de cuve ». La viticultrice livre son raisin exclusivement à la cave de Valvignères.

Une histoire de famille qui se compte sur plusieurs générations. Pourtant, l’Ardéchoise n’était pas destinée à revenir sur les terres agricoles familiales, puisqu’après un bac ES et une licence info-Com, Lolita Flaugère est embauchée au service communication du Comité Vin Auvergne-Rhône-Alpes à Lyon. Mais l’appel de l’extérieur est plus fort. Celle qui glisse avec malice « je suis partie pour mieux revenir », troquera son bureau pour les vignes d’Ardèche. Il y a 8 ans, elle fait le grand saut et revient sur les terres agricoles familiales au côté de son père, qui lui apprend le métier.

« Toutes les générations me contemplent »

En 2019, certaine de son choix, elle décide de valider une VAE afin de devenir chef d’exploitation. Elle se retrouve seule à la tête du domaine. « C’est à la fois une fierté et une pression », confie-t-elle. « J’exploite des vignes que mon grand-père a plantées. Puis c’est une fierté en tant que femme d’être chef d’exploitation. A contrario, c’est une pression, car toutes les générations me contemplent. Eux, ont fait prospérer l'exploitation, c’est une responsabilité de faire avancer l’histoire de notre famille ».

Ce qui n’empêche pas la viticultrice de s’aventurer vers des terres inconnues : « Je suis en pleine réflexion quant à la diversification. La monoculture est dangereuse. Quand il y a un problème sur les vignes, il y a un problème sur l’ensemble de l’exploitation. J’aimerais trouver quelque chose de compatible avec les vignes, pour ne pas avoir à gérer les mêmes problématiques. Mais d’un autre côté, la diversification comporte des risques, on peut vite s’éparpiller ». Lolita laisse la place à de l’expérimentation. « Je me dis qu’on ne sauve pas des vies, donc nous avons le droit d’essayer », glisse-t-elle.

En équilibre entre les enseignements des anciens et l’expérimentation

Pragmatique, Lolita Flaugère enchaîne au sujet de l’indépendance acquise envers l’ancienne génération, « Trois visions du travail et de la vie s’affrontent parfois : le grand-père, le père et la fille, ça permet de réfléchir, on s’apprend des choses mutuellement », lance-t-elle, tout en affirmant recevoir le soutien du grand-père au sujet du temps de congés allongés. « La mécanisation nous a offert du temps libre et l’accès en tant que femme a des métiers auparavant plus masculin, même si sur ce point, on évolue lentement ! », assure la viticultrice.

Cependant, elle n’oublie pas leurs enseignements, ni les acquis des générations précédentes. « Nous effectuons un roulement dans les parcelles, lorsqu’on arrache des vignes trop vieilles, nous faisons pousser 2 années de luzerne avant de replanter des vignes afin d'éviter l’épuisement des sols, je l’ai toujours vu faire. Mais par contre nous supportons davantage l’herbe dans les parcelles qu’à l’époque de nos aînés ! », observe la chef d'exploitation.

Des problématiques différentes

« Le vrai problème, aujourd’hui, est le dérèglement climatique. En 2021, sur Valvignères, 200 hectares n’ont pas été vendangés à cause de la grêle et du gel, en 2022 nous avons subi la sècheresse. 2023 a un contexte sanitaire compliqué avec l’apparition du mildiou ». Mais la viticultrice reste optimiste : « Heureusement, qu’il y a des bonnes surprises comme un orage qui tombe, pile au bon moment ! », sourit-elle. Philosophe et consciente de travailler avec le vivant qu’elle qualifie « d’imprévisible », elle conclut en imaginant une suite à cette histoire de famille : « Si mon fils souhaite reprendre un jour l’exploitation, j’aurai gagné, car ça voudra dire que je lui ai transmis la passion, sans le dégoûter ».

Marine Martin

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