Pour sa dernière assemblée générale en tant que président du syndicat des vignerons de l’AOP Crozes-Hermitage, Pierre Combat a mis en avant la bonne santé de l’appellation malgré un contexte économique et géopolitique difficile.
« En ces temps difficiles dans beaucoup de régions de viticoles, nous ne pouvons que nous réjouir du dynamisme de notre appellation sans oublier que rien n’est acquis à vie et qu’il ne faut jamais s’endormir sur nos lauriers, savoir rester vigilant et humble et garder la bonne direction. » Voilà le message adressé par Pierre Combat en assemblée générale du syndicat des vignerons de l’AOP Crozes-Hermitage, le 14 mars à Mercurol-Veaunes. Une date qui marque la fin de sa présidence désormais assurée par Laurent Combier, son successeur (voir ci-dessous).
Pour Pierre Combat, le dynamisme de l’appellation Crozes-Hermitage est d’abord le fruit d’un « travail collectif et sérieux de l’ensemble des vignerons ». C’est aussi, selon lui, le résultat d’un triptyque associant « des caves coopératives dynamiques, un négoce très impliqué et des caves particulières amenant une belle image ». Cette réussite fait qu’aujourd’hui « il y a plus de vignerons à Crozes-Hermitage qu’il y a vingt ans », a souligné Pierre Combat. Avant d’ajouter : « La présence de nombreux jeunes vignerons est un autre signe positif. Cette vitalité est pour moi la plus belle des récompenses car elle démontre que les bases de notre appellation sont suffisamment solides pour inciter les jeunes générations à y construire des projets qui sont évidemment des projets professionnels mais qui sont aussi des projets de vie. »
Un rendement moyen correct
Dans son rapport moral, Pierre Combat est revenu sur les faits marquants de la campagne 2023. Il a notamment évoqué la tornade (vent et grêle) du 29 juillet, qui a frappé 500 hectares de vignes dont une centaine très sévèrement, et la canicule durant seize jours en août. Au final, la production a atteint 81 389 hectolitres (contre 73 389 hl la campagne précédente) pour un rendement moyen de 41 hl/ha (contre 37 hl/ha précédemment). Un millésime qualifié par Pierre Combat de « qualitatif et correct en termes de rendement ».
Pour 2024-2025, les administrateurs du syndicat ont adopté un contingent de 60 ha pour les demandes d’autorisation de plantation. « Cela peut paraître important, mais au vu des demandes de notre appellation et de son potentiel, il nous semble légitime de poursuivre ce développement », a dit Pierre Combat. À la condition que des communes, lors de la révision de leur PLU, n’entravent pas le processus. Pierre Combat a ainsi regretté « l’oreille sourde de la municipalité de Chanos-Curson », laquelle a refusé de déplacer trois ha d’espaces boisés hors de l’aire d’appellation de Crozes-Hermitage. La maire de Chanos-Curson, qui a regretté cette « attaque frontale », a répondu en expliquant « avoir déjà déplacé des surfaces » et « tenu compte d’enjeux comme la trame verte et bleue », tout en assurant que sa commune est « fière de son vignoble et de ses viticulteurs ».
Situation « satisfaisante mais préoccupante »
Par ailleurs, Sébastien Lacroix, responsable du service économique à Inter Rhône, a qualifié la situation de l’appellation Crozes-Hermitage de « satisfaisante mais préoccupante » : satisfaisante car les sorties de chais 2022-2023 sont bonnes, les cours bien orientés (ceux du vrac ont progressé de 60 % en dix ans et progressent encore début 2024) et les stocks en cours de reconstitution ; préoccupante car les ventes reculent dans la grande distribution mais aussi à l’export, en particulier vers les États-Unis. « Le Crozes-Hermitage est rattrapé par le contexte de crise économique et géopolitique », a-t-il fait remarquer. Une situation que les responsables de l’appellation ont bien en tête sans être alarmistes mais offensifs. Les actions de promotion de l’appellation vont ainsi se poursuivre à un rythme soutenu pour « faire rayonner le Crozes-Hermitage sur les marchés export », notamment à New-York et Bruxelles. L’AOP s’est dotée d’une nouvelle identité visuelle avec un logo plus facilement « digitalisable », et une nouvelle ligne éditoriale a été conçue pour les réseaux sociaux. De plus, ont été créés des objets dérivés accessibles sur une boutique éphémère.
Bien d’autres actions de communication (relations presse, évènements au vignoble…) seront menées en 2024. Et du 26 au 28 avril, se tiendra la troisième édition du Grand week-end des Crozes-Hermitage.
Christophe Ledoux
Laurent Combier, nouveau président de l’AOP Crozes-Hermitage
Laurent Combier est le nouveau président du syndicat des vignerons de l’AOP Crozes-Hermitage, organisme de défense et de gestion (ODG). Il succède à Pierre Combat, qui ne se représentait pas.
À la tête du domaine qui porte son nom à Pont-de-l’Isère depuis 1990, Laurent Combier est depuis le 14 mars le nouveau président du syndicat des vignerons de l’AOP Crozes-Hermitage. Son élection s’est déroulée à l’issue de l’assemblée générale du syndicat, à Mercurol-Veaunes (lire ci-dessus). « Pierre Combat peut être fier du travail accompli et c’est un honneur que de lui succéder, a-t-il déclaré. En tant que membre du conseil d’administration et du bureau de l’ODG Crozes-Hermitage depuis une quinzaine d’années, j’ai pu observer toute la force de notre appellation à fédérer et à avancer en équipe, et Pierre y est pour beaucoup ! C’est une vraie chance que de pouvoir compter sur des personnalités investies et toujours prêtes à défendre les valeurs de Crozes-Hermitage. »
À l’agenda du nouveau président figurent plusieurs dossiers justement initiés par son prédécesseur, comme la montée en puissance du Grand Week-end des Crozes-Hermitage, la spécification des lieux-dits historiques du vignoble qui permettra de caractériser des terroirs particuliers, ou le développement de pratiques issues de l’agroécologie.
À NOTER /
Unesco, sentier touristique et inventaire d’archives
Depuis 2021, la filière viticole de Vienne à Valence agit pour faire classer le berceau d’origine de la syrah, devenu le septième cépage mondial le plus planté dans le monde, au patrimoine mondial de l’Unesco.
Par ailleurs, l’appellation travaille actuellement avec Arche Agglo à la création d’un « parcours paysager touristique cyclo » qui traversera tous les secteurs de l’AOP.
Enfin, l’AOP Crozes-Hermitage a débuté un travail d’archives en collaboration avec l’université d’histoire de Lyon. Dans chaque commune de l’aire d’appellation, un vigneron a été désigné pour recenser tous les documents disponibles dans les familles, les mairies et les entreprises.
Densités : modification du cahier des charges
Un dossier similaire à celui de 2019 a été déposé pour offrir la possibilité, dans le vignoble d’une part, d’allées supérieures à 2,50 m sur les parcelles respectant la densité de plantation ; d’autre part, la possibilité de continuer à produire sur les parcelles dont l’écart moyen entre les rangs est compris entre 2,50 et 2,75 m de moyenne, sous réserve d’un abaissement de rendement. Dans ce cas, il est nécessaire de déclarer ces parcelles auprès de l’ODG.
Évolution de l’étiquetage
La nouvelle réglementation sur l’étiquetage des vins est désormais en vigueur. Tous les vins produits après le 8 décembre 2023 doivent indiquer la liste des ingrédients et leur valeur énergétique. De nouvelles réunions d’informations seront prochainement organisées. Pour en savoir plus, contactez Léa Tixier, juriste au syndicat général des vignerons des Côtes-du-Rhône.
Un diagnostic des atouts environnementaux
Un groupe du syndicat des vignerons de l’AOP Crozes-Hermitage travaille actuellement avec le conservatoire d’espaces naturels (CEN) Rhône-Alpes afin de mettre en cohérence les enjeux de production et de préservation de l’environnement. L’étude porte sur une zone élargie de 11 850 ha, bien au-delà, donc, de l’aire d’appellation qui compte 4 259 ha. Une présentation des premiers résultats est prévue pour mars 2025.
Hommages
En ouverture de l'assemblée générale, Pierre Combat a rendu hommage à Éric Chanas, agriculteur à Mercurol-Veaunes décédé accidentellement le 5 juillet 2023 à l'âge de 49 ans, et à Didier Beynet, éleveur à Saint-Nazaire-le-Désert et responsable agricole, décédé le 11 mars dernier des suites d'une longue maladie. Une minute de silence a été observée.
